« De tout temps, l’argent du cacao a suscité tous les fantasmes. Il est accusé d’avoir servi de caisse noire aux régimes successifs pour financer leurs opérations politiques. Le journaliste Guy-André Kieffer, qui a enquêté sur le sujet, est porté disparu depuis avril 2004. »
Extraits de l’article « Main basse sur le cacao »
de P. Airault, avec S. Ballong et B. Mieu - 11/08/2010
« Le caricaturiste du Financial Times le croque en deus ex machina chauve, le regard noir, tenant dans sa main une tablette de chocolat griffée du sigle du dollar américain. Anthony Ward, alias "Chocolate Finger" [...]
[…] Ward disposerait d’informations inédites sur l’évolution de la situation politique en Côte d’Ivoire, écrivent les auteurs en été 2010. Le pays va entrer dans une période incertaine à partir du mois d’août [période] devant mener à l’élection présidentielle, attendue en octobre.
Ward a plutôt le nez fin d’habitude. De fin 2001 à août 2002, il a beaucoup spéculé sur le cacao, en finissant par acheter 203 000 t de fèves. Le produit a flambé après le coup d’État de septembre 2002 en Côte d’Ivoire. Repoussés d’Abidjan, les rebelles se replient sur Bouaké avant de progresser à l’ouest du pays, paralysant les sorties de cacao au port de San Pedro. La tonne avait alors atteint 1 600 livres, contre 1 000 en janvier 2002. Les bénéfices d’Armajaro avaient alors été estimés à plus de 60 millions de dollars (environ 62 millions d’euros à l’époque). « Ward tente régulièrement des coups, confie un ancien cadre du groupe ivoirien Sifca. Il était venu nous voir à la fin des années 1990 pour nous proposer d’acheter l’essentiel de la production ivoirienne. On avait refusé. »
Le mystérieux Mister Ward [...] fonde en 1998 la société Armajaro. Aujourd’hui, celle-ci compte plus de 2 000 employés et a réalisé un chiffre d’affaires de 1,29 milliard d’euros l’an dernier. La société est implantée au Ghana, au Nigeria, en Côte d’Ivoire, en Sierra Leone, au Kenya, en Tanzanie, en Ouganda et dans plusieurs pays d’Asie. Le pur trader, qui finance ses achats massifs par plusieurs fonds d’investissement, s’est progressivement lancé dans la production et la transformation. Il a racheté le 28 juillet dernier la société Theobroma, qui produit du chocolat certifié bio, et possède notamment des usines aux Pays-Bas et au Nigeria. Auparavant, il travaillait avec le géant asiatique Petra Foods, à qui il vient de revendre ses parts dans la transformation.
Armajaro négocie annuellement entre 400 000 t et 500 000 t de cacao, soit un septième de la récolte mondiale, et a développé des projets avec 45 000 planteurs ghanéens et 50 000 ivoiriens. Il possède un réseau de stations météo en Afrique de l’Ouest et déploie chaque année des équipes de recherche pour faire de la prévision (comptage des cabosses sur les arbres, maladie du cacaoyer, pluviométrie…). De quoi se faire une idée précise des récoltes à venir. Et avoir un avantage sérieux sur ses rivaux.
De la politique au business
[...] Après les événements de septembre 2002, certains l’ont même suspecté d’avoir financé la rébellion ivoirienne pour faire monter les cours. Il s’en défend, et aucune preuve n’a jamais été apportée. Il faudra néanmoins l’intervention du député Ben Soumahoro pour renouer le lien entre les représentants d’Armajaro et le chef de l’État.
Ward essaie d’avoir de bonnes relations avec les hommes politiques ivoiriens de toutes obédiences. Amateur de bonne chère et de bon vin (il possède des vignes en Afrique du Sud), ce taiseux préfère les rencontres et dîners discrets aux grand-messes médiatiques. Dans les années 1990, il voyait régulièrement plusieurs caciques du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et était souvent associé aux activités cacaoyères de Daniel Usher, le fils d’Arsène Assouan Usher, un baron du parti au pouvoir. Mais les deux partenaires ne se sont pas entendus longtemps dans les affaires…
Après l’élection de Gbagbo, il s’est rapproché des refondateurs comme Paul Antoine Bohoun Bouabré, à l’époque grand argentier du pays. Et depuis la signature des accords de Marcoussis, en janvier 2003, il entretient également de bonnes relations avec les Forces nouvelles (FN). On l’a vu aux côtés du Premier ministre, Guillaume Soro, lors du dîner annuel de la Fédération du commerce du cacao, en mai 2009, à Londres.
Le Britannique possède surtout dans son équipe une carte maîtresse en la personne de Loïc Folloroux, son directeur Afrique, fils de Dominique Ouattara, l’épouse du patron du Rassemblement des républicains (RDR), Alassane Ouattara [...]. Ward est allé chercher le jeune homme chez le négociant anglais ED & F Man en septembre 2005. Folloroux, 35 ans, a grandi en Côte d’Ivoire avant de poursuivre ses études aux États-Unis, où il a travaillé pour la banque Merrill Lynch. Sa première tâche, en arrivant chez Armajaro, a été de reprendre toutes les opérations de sourcing (achat) qui étaient déficitaires. Puis il a diversifié les activités (cacao, café, sucre) et travaille actuellement à l’ouverture de nouvelles filiales au Cameroun et au Liberia.
[...] Sous la pression des bailleurs de fonds et des multinationales comme Cargill et ADM, les autorités ivoiriennes ont libéralisé la filière à partir de la fin des années 1990. Mais la transition politique chaotique a entraîné des dérives profondes. L’encadrement des planteurs n’est plus assuré, les pistes se sont détériorées et la commercialisation du produit donne lieu à de sévères bagarres entre négociants. Une trentaine de responsables des organes de gestion de la filière doivent être jugés en octobre pour avoir détourné l’argent des planteurs.
De tout temps, l’argent du cacao a suscité tous les fantasmes. Il est accusé d’avoir servi de caisse noire aux régimes successifs pour financer leurs opérations politiques. Le journaliste Guy-André Kieffer, qui a enquêté sur le sujet, est porté disparu depuis avril 2004. L’inspecteur des finances François Kouadio, auteur d’un rapport très critique en juillet 2002, vit aujourd’hui reclus à Paris. Quant à l’avocat parisien Xavier Ghelber, il a failli ne pas revenir de sa mission d’audit du cacao ivoirien, en novembre 2004. Enlevé par des hommes armés à l’hôtel Ivoire et menacé de mort, il sera finalement remis aux militaires français. Depuis le mois de février 2009, le président Gbagbo a confié au Comité chargé de la réforme de la filière café-cacao (CRCC), dirigé par sa conseillère Géraldine Odehouri-Brou, le soin de proposer une réorganisation des activités. Ce comité a rendu ses propositions en mars dernier. En lieu et place des cinq anciens organes de gestion, convaincus de détournements, le CRCC prône la mise en place d’un Haut-Commissariat du café et du cacao, rattaché à la présidence de la République. Composé de sept membres, il sera le superviseur de la filière. Le CRCC prévoit aussi un Organe de gestion de la filière chargé des aspects de production, commercialisation et promotion. Les autorités souhaitent aussi réinstaurer un système de vente à terme des produits et créer une Chambre des producteurs de café-cacao. Elles affichent la volonté de transformer 50 % du cacao et 30 % du café sur le territoire national d’ici à 2015. Objectif final : accroître les bénéfices des opérateurs nationaux, du producteur à l’industriel. Pour Gbagbo, la Côte d’Ivoire doit retrouver sa souveraineté sur le cacao. « Chocolate Finger » l’a bien compris, qui investit massivement dans le pays pour continuer à jouer avec la petite fève nationale sur le marché de Londres. »
Depuis le coup d'Etat du 11 avril :
Lu sur Côte d'Ivoire, la vraie - Dimanche 8 mai 2011 :
"LA DÉSILLUSION CHEZ LES PAYSANS, LE CACAO PAYÉ À 300 F.CFA SOUS OUATTARA!
C'est vraiment la désillusion chez nos braves paysans en ce moment. Ils croyaient au miracle avec le nouveau régime installé de force par la communauté internationale, mais c'est l'enfer qui commence à leur être servi.
Sous le régime du Président Gbagbo, les paysans percevaient jusqu'à 1000 F.CFA le kilo de cacao et voir plus. Le café était payé à près de 700 F.CFA le kilo, lorsque les prix sur le marché international avoisinaient ceux qui sont pratiqués en ce moment (1813 F.CFA pour le cacao et 1141 F.CFA pour le c afé)*.
Aujourd'hui avec ce même prix, le kilo de cacao est acheté à 300 F.CFA (dans la région de Daloa 400 F.CFA) et celui du café entre 175 F.CFA et 200 F.CFA aux paysans.
Jamais sous le Président Gbagbo les paysans avaient atteint un prix aussi bas qui frôle la misère.
Et pourtant le camp Ouattara avec leur leader en tête avait faire croire le contraire aux paysans. Ils faisaient même dire aux paysans ce slogan: "Trop, c'est trop. Gbagbo dégage! tu nous a trop volé". Ceux qui se sont laissés avoir, commencent à se rendre compte que le Président Gbagbo était véritablement leur bienfaiteur.
"Le vrai bonheur, on l'apprécie que lorsqu'on l'a perdu", avait dit le sage Houphouet. Ce n'est pas loin d'être la réalité ici en Côte d'Ivoire."
ce n'est que le debut,la population ivoirienne,surtout rurale n'aura que ses yeux pour pleurer!je suis deçu de nos parent baoulé à qui le président gbagbo à tout donné,mais malgré cela ils l'ont trahis.faites un tour à gagnoa dans le village de gbagbo,vous aurez les larmes aux yeux,parceque le monsieur n'a rien foutu laba car pour lui la cote d'ivoire est une et indivisible,voila pourquoi il a construi yamoussoukro au détriment de sa région;mais malheureusement c'est les peuples bété,attié et guéré qui payent le lourd tribut dans cette sale guerre aucours de laquelle la france a renverser le président gbagbo pour installer le sous-préfet ouattara.mais qui vivra vera,ya un dieu pour les plus faible!!!!!!
RépondreSupprimerRien n'est fini en effet. J'ajoute que pour qui a des yeux pour voir, dès à présent la victoire et la défaite ne sont pas où l'on pourrait croire. Une page d'histoire s'est écrite qui ne pourra être effacée.
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